Album de photo de la famille D.




Extraits de Album de photos de la famille D., 1939-1964
« La photographie devient pour moi un médium bizarre, une nouvelle forme d’hallucination : fausse au niveau de la perception, vraie au niveau du temps ; une hallucination tempérée en quelque sorte, modeste, partagée […] image folle, frottée de réel. »
Roland Barthes, La chambre claire. Seuil, Paris, 1980, p.177.

Après avoir travaillé sur la reconstruction (fictive) de sa propre enfance, Boltanski se lance dans la mémoire truquée des autres. Il emprunte des photos de famille à un ami, Michel Durand, Galériste parisien. Il fait retirer 150 images par un photographe et reconstitue une histoire de cette famille. Il attribue une identité à chacun des individus. "J'ai voulu, dit-il, moi qui ne savais rien de tous ces gens, tenter de reconstituer leur vie à partir de ces photos qui ont été prises à tous les moments importants deleur existence, et qui resteraient aprs leur mort comme témoignage de leur vie."

Mais ces images sont moins la reconstitution de l'histoire de la famille D., que les témoins de rituels collectifs qui nous renvoient à des souvenirs communs,comme ceux de la fête de famille ou des vacances en bord de mer.

Ce que l'album révèle, c'est aussi la fragilité de nos vies, cristalisées dans quelques événements tellement stéréotypés qu'ils évacuent ce qu'il y a de singulier, ce que désespérément, pourtant, nous essayons de fixer dans chaque photographie, et qui toujours se confond dans une expérience collective, anonyme, dès que la photographie sort du contexte privé.

Source: http://bulbe.com/fr/themes/famille/boltanski.php?tfi=4, Centre Pompidou, Lynn Gumpert, Christian Boltanski, Paris, Flammarion, 1992.